I mean, it’s the official language since 1066, isn’t it?
J’avais promis (menacé?) sur Discord d’écrire un article en français sur la dernière session en ligne, celle du 21 mai; je vais essayer de faire suite à cette promesse, même si je dois d’emblée avertir les lecteur.rices que la dernière fois que j’ai dû écrire un texte relativement consistent en français (le résumé de ma thèse, il y a bien trop de temps) le résultat était un œuvre proustien avec des phrases et sous-phrases entrelacées que mes pauvres collègues chargés de la relecture avaient beaucoup de mal à déchiffrer…Caveat emptor, alors! (Il peut quand-même être de comfort de savoir que j’écris ces lignes sur le sol français, dans l’Eurostar en attendant son départ à la Gare du Nord, donc il y a peut-être eu un certain degré d’inspiration géographico-linguistique)
En tout cas, cette session portait sur le Conseil supérieur de la Guerre en général et les exercices organisés par ledit Conseil en 1936-1937 en particulier (il y a peut-être une session intéressante à pourvoir sur le sujet même de la conception et planification de ces exercices; on ne sait jamais si la GJGAC (Groupe de Jeux de Guerre de l’Auberge des Châtaignes) peut en tirer des leçons!).
Je ne pense pas qu’il y a beaucoup à dire sur la session elle-même; c’était un jeu de comité relativement banal sur le sujet; j’ai apprécié l’article que Nick a écrit sur ses expériences avec l’usage d’IA pour incarner le général Prételat, et comme il a indiqué, le jeu est utile comme introduction au sujet, mais comme d’habitude, les discussions avant et après sur le sujet de la culture militaire française dans l’entre-deux-guerres, et les leçons qu’on peut en tirer pour des organisations (militaires ou non) actuelles, étaient bien plus intéressantes que le jeu lui-même.
On connait tous.tes les mythes qui flottent sur la campagne française de 1940 (surtout dans l’anglosphère); évidemment le public actuel est à exclure, mais ailleurs l’idée des ‘singes capitulards mangeurs de fromage’ est encore bien vivant. La raison pour la défaite française n’était pas une décadence générale de la part des vainqueurs de 1918 (les pertes allemandes, surtout dans la deuxième phase de la campagne, quand l’issue finale était déjà connue, étaient comparables à celles de la campagne au front de l’est…), mais plutôt des fautes de doctrine, de commandement et, aussi, simplement de la mauvaise chance.
C’est du commandement français qu’on a beaucoup parlé; la plupart des généraux qui ont participé à l’exercice ont aussi eu des hauts commandements en 1940 (Gamelin, le commandant en chef des armées alliées; Georges, commandant du théâtre d’opérations Nord-Est, c’est à dire contre l’armée allemande; Prételat, commandant de la Groupe d’Armées 2, essentiellement les armées de la ligne Maginot; et finalement Héring, gouverneur militaire de Paris et plus tard commandant de l’Armée de Paris).
Il est indéniable que dans les rangs des officiers supérieurs de l’armée française de l’entre-deux-guerres, une certaine sclérose intellectuelle s’était installée, qui avait amené l’armée française à s’attendre à une répétition des combats de la Grande Guerre, avec peut-être quelques améliorations légères de l’armement. Cette sclérose était en partie due à la complaisance naturelle qui suit une grande victoire – on parle ici de la ‘magistère bleu horizon’, d’après la couleur des uniformes des poilus de 1918. On a aussi souvent noté l’âge avancé de la plupart des généraux français, qui avaient (si je me souviens bien) en moyenne cinq ans de plus que leurs homologues allemands.
Mais la culture de l’armée française y était aussi pour quelque chose; on a parlé de l’exemple de Gamelin, qui certainement était un intellectuel brillant, et qui était effectivement le candidat incontestable pour la position de commandant en chef en 1939, mais qui manquait de flexibilité mentale au moment décisif. On peut aussi citer l’exemple de Charles de Gaulle, encore colonel de cavalerie dans les années 30, qui préconisait l’emploi en masse de chars de combat, mais qui était vu comme un excentrique presque dangereux. Certainement, avoir des opinions hors norme n’était pas propice à une belle carrière dans l’armée de la Troisième République (et, je dirais, dans n’importe quel armée, du moins en temps de paix).
Alors comment une organisation peut-elle prévenir une telle sclérose intellectuelle, sans pourtant sombrer dans le chaos? Comment peut-on reconnaître qu’une ère nouvelle a commencé? La discussion s’est portée ici, comme exemple moderne, sur l’essor des drones sur les champs de combat et l’application des leçons de la guerre d’Ukraine dans les armées occidentales.
Et finalement, ce ne serait pas une session GJGAC si je ne me serais pas laissé pousser (gentiment) vers l’organisation d’une nouvelle session – cette fois de la situation politique en Algérie (alors française) juste après le débarquement anglo-américaine en 1942 (l’opération Torch). Je n’en connaissais que les faits de base, mais après avoir lu l’article que le Wikipédia francophone a sur le sujet, je suis convaincu, d’abord que c’est un sujet extrêmement intéressant, mais aussi que c’est un sujet qui mérite beaucoup de recherche. Heureusement (si j’ai bien compris) la prochaine session libre n’est qu’en décembre…
P.S. J’écris ce texte en part pour préparer l’examen du DALF, donc si vous détectez des erreurs (scandaleuses ou on) de français, n’hésitez pas à me le faire savoir (comme ça, je pourrais encore ajuster le niveau de francitude à assimiler dans les semaines prochaines).
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